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La mission « flash » sur les cours criminelles a rendu un bilan d’étape

Pénal - Informations professionnelles, Vie judiciaire
06/01/2021
La mission d’information flash sur l’expérimentation des cours criminelles a rendu son bilan d’étape le 16 décembre 2020. Constat et recommandations, retour sur le rapport. 
Depuis le 22 septembre, associations, avocats, magistrats, syndicats, DACG, etc, ont été auditionnés par la commission des lois de l’Assemblée nationale dans le cadre de la mission flash sur les cours criminelles.
 
Antoine Savignat et Stéphane Mazars, rapporteurs, ont rendu un bilan d’étape le 16 décembre 2020. Ils reviennent sur le dispositif et font plusieurs recommandations dans l’hypothèse de sa généralisation.
 
Dans les grandes lignes, le bilan fait état :
- d’une préservation de l’oralité des débats ;
- d’une économie de temps utile.
 
Avec quelques nuances tout de même : le travail d’instruction reste le même et la tenue simultanée d’une session d’assises et d’une session de cour criminelle reste impossible, sauf à la cour d’appel de Versailles qui dispose de deux salles.
 
La mission relève également que les économies de moyen sont limitées.
 
 
Quelles améliorations possibles en cas de généralisation ?
La mission soumet quand même plusieurs recommandations si le dispositif doit se généraliser. À savoir :
- une modification des critères de renvoi des affaires devant la cour criminelle ou la cour d’assises et faire en sorte que cette décision soit prise au cas par cas après consultation des parties, la mission explique notamment que « certains crimes punis de vingt ans ou moins mériteraient d’être jugés par une cour d’assises. À l’inverse, certains crimes punis de vingt ans ou plus pourraient faire l’objet d’une audience devant la cour criminelle » ;
- une convergence des délais maximaux entre la mise en accusation et le procès lorsque l’accusé est placé en détention provisoire, un délai de neuf mois est proposé (il est actuellement de six mois pour les cours criminelles et douze pour la cour d'assises) ;
- la création de « pôles criminels » dans les cours d’appel afin que la présidence des cours criminelles soit systématiquement confiée à un président de cour d’assises « qui a l’habitude et la pratique de l’oralité des débats » ;
- un accord sur le nombre d’auditions de témoins et d’experts prises en charge, avec les barreaux ou au cas par cas entre les parties et le parquet ;
- le maintien de la cour d’assises pour certaines affaires criminelles en première instance et, systématiquement, en appel ;
- la possibilité pour des avocats honoraires de siéger comme assesseurs dans les cours criminelles afin de concilier la présence d’un regard extérieur et le maintien des compétences juridiques de la formation de jugement, « pour renforcer le caractère « citoyen » de la cour criminelle » (cette possibilité pourrait être étendue à d’autres professionnels du droit, v. Commission des lois, 16 déc. 2020).
 
Ainsi, « rien ne nous dit qu’il faut que l’on cesse cette pratique des cours criminelles départementales. Mais elles ne doivent pas se substituer aux cours d’assises, elles doivent venir en complément » souligne Stéphane Mazars (Commission des lois, 16 déc. 2020).
 
 
Une expérimentation prévue pour 3 ans
Pour rappel, l’article 63 de la loi du 23 mars 2019 a introduit un dispositif expérimental pour une durée de trois ans dans dix départements : les cours criminelles. Depuis, l’expérimentation a été étendue à dix-huit départements par la loi relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, publiée le 18 juin 2020 au Journal officiel (v. Loi fourre-tout : quelles dispositions en droit pénal ?, Actualités du droit, 18 juin 2020 et v. Expérimentation des cours criminelles : la liste des nouveaux départements concernés publiée, Actualités du droit 22 juill. 2020).
 
Les cours criminelles sont compétentes pour juger des personnes majeures accusées d’un crime puni entre 15 et 20 ans de réclusion, lorsqu’il n’est pas commis en état de récidive légale. La mission rappelle que la procédure est identique à celle devant la cour d’assises à trois exceptions :
- l’absence de jurés, compensée par le passage de deux à quatre assesseurs ;
- le délai maximal d’audiencement qui est de six mois lorsque l’accusé est détenu (douze pour la cour d’assises) ;
- la possibilité d’accéder au dossier écrit en amont pour les membres de la cour.
 
Les objectifs initiaux de l’expérimentation sont précisés :
- traiter plus rapidement certaines infractions ;
- limiter le recours à la correctionnalisation ;
- participer à la résorption du stock des affaires renvoyées devant les cours d’assises ;
- et répondre à des difficultés résultant de la désignation des jurés.
 
Il n’empêche que l’article 63 de la loi de 2019 a fait l’objet de nombreuses critiques. Elles portaient sur le recul de l’oralité des débats, l’absence du jury populaire, la hiérarchisation des crimes ou encore les objectifs économiques au détriment de la qualité des débats.
 
Les rapporteurs, en conclusion, signalent : « Nous devrons veiller (…) à ce que l’expérimentation ne s’étende pas indéfiniment dans le temps dans un souci d’unité de la justice criminelle sur le territoire national ».
 
 
 
Source : Actualités du droit